Bilan de l’année 2023 du projet collectif de recherche (PCR) triennal « Paléoécologie de la grotte du Lazaret : Interactions « Hommes-milieu(x) sur le littoral maralpin au cours du Pléistocène moyen final (MIS 6) »

Le bilan de l’année 2023 du projet collectif de recherche (PCR) triennal « Paléoécologie de la grotte du Lazaret : Interactions « Hommes-milieu(x) sur le littoral maralpin au cours du Pléistocène moyen final (MIS 6) »peut être résumé de la façon suivante :

A – Classement des collections

L’année 2023 a été principalement consacrée au classement des collections paléontologiques et préhistoriques de la grotte du Lazaret. Ainsi, l’équipe scientifique du Lazaret a procédé au nettoyage, au classement et au conditionnement de la totalité du mobilier archéologique (600 000 objets pour rappel).

B – Publications 2023

Deux articles ont été publiés :

Barakat S, Le Corre M, Willmes M, Cohen J, Vuillien M, Desclaux E and Britton K (2023). Laser ablation strontium isotopes and spatial assignment show seasonal mobility in red deer (Cervus elaphus) at Lazaret Cave, France (MIS 6). Front. Ecol. Evol. 11:988837. doi: 10.3389/fevo.2023.988837

Rivals, F., Cohen, J. and Desclaux, E. (2023). Dietary traits of the ungulates from the Middle Pleistocene sequence of Lazaret Cave: palaeoecological and archaeological implications. Archaeological and Anthropological Sciences. 15:23. doi : 10.1007/s12520-023-01719-2

En outre, en 2023, les résultats du PCR « paléoécologie du Lazaret » ont fait l’objet de 4 présentations orales, à l’occasion de 3 colloques :

Vuillien, M., Crégut-Bonnoure, E., Brugal, J.P., Mousous, A., Notter, O., Rossoni-Notter, E., Gourichon, L., Desclaux, E. (2023). Les bouquetins maralpins : écomorphologie des bouquetins (Capra ibex) présents dans l’arc liguro-provençal entre la fin du Pléistocène moyen et le début de l’Holocène. XXIVème Colloque du GMPCA, Archéométrie 2023, Campus Saint-Jean d’Angély (avril 2023, Nice), p. 104-105.

Weppe, L., Vigier, N., Thibon, F., Montanes, M., Cohen, J., Theodoropoulou, T., Desclaux, E. (2023). Analyse des isotopes stables du Lithium des invertébrés marins (Bittium sp.) du Pléistocène moyen final (MIS 7 et 6) de la grotte du Lazaret (Alpes-Maritimes, France). XXIVème Colloque du GMPCA, Archéométrie 2023, Campus Saint-Jean d’Angély (avril 2023, Nice), p. 99-100.

Delegue, L., Desclaux, E., Rolando, C., Bray, F. (2023). Sexing of ancient Bovidae teeth by high resolution mass spectrometry. 39ème édition des Journées Françaises de Spectrométrie de Masse, Palais du Pharo (septembre 2023, Marseille).

Desclaux, E., Cohen, J. (2023).  The prehistoric cave of the Lazaret (Nice, Alpes-Maritimes, France): a place of synergy between the transmission of scientific culture and research. Congrès international « Les abîmes du Temps – La grotte de Malalunga – l’Homme de Néandertal » (octobre 2023, Bari, Italie).

C – Etude préliminaire de l’ichtyofaune de la grotte du Lazaret

L’étude de l’ensemble des 522 restes ichtyofauniques (téléostéens) collectés dans le remplissage de la grotte du Lazaret a permis de confirmer la présence d’un climat froid sur l’ensemble de la séquence connue par les fouilles récentes (ensembles C II inférieur, ensemble C II supérieur et ensemble C III). En outre, il semble que la mort de la majorité des individus se soit déroulée entre la fin de l’automne et le début du printemps. Cela indique que nous avons peut-être à faire à un spectre faunique marin hivernal. Enfin, il n’est pas exclu que des restes de téléostéens (et de mollusques marins) aient été ramenés indirectement par les néandertaliens via l’apport de laisses de mer (herbier de posidonie) dans la grotte.

D – Etude taphonomique et paléoécologique de l’avifaune du Lazaret

L’étude taphonomique de l’ensemble de l’avifaune du Locus VIII qui a montré une accumulation d’origine multiple :

  • nidification dans la grotte et/ou la mort d’individus sur place (thanatocoenose),
  • prédation par des rapaces et des petits carnivores (coprocoenose),
  • part anthropique, avec notamment la mise en exergue de stries sur un nombre non négligeable d’espèces (Columba livia, Aquila Chrysaetos, Bubo bubo, Pyrrhocorax pyrrhocorax, Corvus corone et Pica pica).

L’étude paléoécologique de l’avifaune est en accord avec les résultats obtenus dans l’étude des petits vertébrés et décrivent un caractère homogène, avec d’importantes zones boisées et une humidité fortement marquée sans variation de grande amplitude tout au long de la séquence. Les oiseaux semblent toutefois indiquer une pluviométrie encore plus marquée à la fin de la séquence. Ce caractère homogène est probablement lié au fait qu’au Pléistocène moyen final, les oscillations du MIS 6 ont été de moindre amplitude, comparativement aux oscillations climatiques du Pléistocène supérieur (MIS 5 à MIS 2).

Strie de découpe observée sur un coracoïde gauche de corneille (Corvus corone) provenant de la grotte du lazaret

E – Taphonomie des lagomorphes de la grotte du Lazaret

La chasse aux petits gibiers est un sujet très discuté dans le comportement des néandertaliens et tente souvent de le réduire à une stricte nécessité de survie alimentaire. Cependant, comme nous avons pu le constater, à la grotte du Lazaret l’apport de la viande de lapin dans l’alimentation des hommes reste minime et ne représente pas une source particulièrement nécessaire à leur survie. Le lapin reste toutefois une bonne ressource en sels minéraux dont on voit que le choix de la cuisson, par braisage, optimise le rendement nutritif de cette viande. En effet, l’étude de certaines altérations colorées se présentant sous la forme de points et localisés préférentiellement sur les diaphyses des os longs de lagomorphes et de certains grands mammifères permet de suggérer que la cuisson par braisage a été opérée par les néandertaliens de la grotte du Lazaret. Cette hypothèse doit être prochainement vérifiée grâce à de l’expérimentation, couplée avec des observations au MEB, qui sera menée non seulement sur des lapins (Oryctolagus cuniculus) mais également et plus ponctuellement sur des herbivores (Bos domesticus) et de l’avifaune (Gallus domesticus) actuels. Il est envisagé d’étendre cette étude à d’autres accumulations de lagomorphes provenant de divers sites du Paléolithique moyen du pourtour méditerranéen (MIS 6, 5 et 4 d’Italie du nord, du sud de la France et de la péninsule ibérique).

F – Sexage des bovinés de la grotte du Lazaret par protéomique

L’analyse LC-MS/MS de 20 dents de Bos primigenius et de Bison priscus provenant de la grotte du lazaret a permis d’identifier 4 individus mâles et 16 individus femelles parmi les spécimens se rapportant au genre Bos. Ces résultats et cette méthode pourraient permettre de mieux comprendre l’alimentation de l’homme dans le passé.

Il s’agit de la 1ère méthode de sexage en paléoprotéomique sur une espèce autre qu’Homo sapiens.

Ces résultats ont été présentés lors du congrès SFSM 2023 du 5 au 8 septembre 2023 à Marseille, au Palais du Pharo.

Maxillaire droit d’aurochs (Bos primigenius) provenant de l’UA 25 de la grotte du Lazaret

G – Etude des matières premières des outillages lithiques de l’unité archéostratigraphique (UA)25

Une étude de la composante silicite de la grotte du Lazaret a été initiée, dans le cadre d’une démarche à trois niveaux :

  • caractériser les silex retrouvés à la grotte du Lazaret de façon à déterminer les aires de provenance et la nature des territoires fréquenté,
  • aborder le sujet de l’économie des roches à la grotte du Lazaret, en abordant la question du traitement différentiel du corpus « calcaire » et du corpus « silicite »,
  • intégrer la collection en silicite de la grotte du Lazaret dans l’étude sur l’histoire des techniques de la fin du Pléistocène moyen et du début du Pléistocène supérieur.

Les premiers résultats appliqués à l’UA 25 de la grotte du Lazaret devront faire l’objet d’un diagnostic technologique plus précis, à la fois pétroarchéologique et techno-fonctionnel.

Les premières observations témoignent du large spectre des roches exploitées et du large territoire parcouru directement ou indirectement par les populations de l’UA 25 de la grotte du Lazaret. La suite de l’étude qui se déroulera en 2024 devra notamment intégrer les refus de tamis, de façon à mieux aborder les dynamiques techno-économiques de formation de l’assemblage. Les faciès devront faire l’objet d’une détermination plus précise et d’une documentation photographique adéquate. La confrontation entre pratiques techniques, structures fonctionnelles et faciès pétrographique devrait autoriser une nouvelle lecture des comportements techno-économiques et des pratiques techniques exprimés à la grotte du Lazaret.


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Emmanuel Desclaux (22 février 2024). Bilan de l’année 2023 du projet collectif de recherche (PCR) triennal « Paléoécologie de la grotte du Lazaret : Interactions « Hommes-milieu(x) sur le littoral maralpin au cours du Pléistocène moyen final (MIS 6) ». Paléoécologie du littoral maralpin. Consulté le 3 novembre 2024 à l’adresse https://doi.org/10.58079/vvyu


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