Présentation d’un poster sur les stries de découpe observées sur un humérus d’aigle royal (Aquila chrysaetos) du Lazaret à l’occasion de la 65ème reunion annuelle de la “Hugo Obermaier Society for Quaternary Research and Archaeology of the Stone Age e.V” (Weimar, 2-6 avril 2024) :

Anna Rufà(1,2), Ruth Blasco (3,4), Jessica Cohen(5) & Emmanuel Desclaux(5,6)

(1) ICArEHB – Interdsciplinay Center for Archaeology and the Evolution of Human Behaviour, Universidade do Algarve, Campus de Gambelas 8005-139 Faro, Portugal
(2) PACEA UMR 5199, Univ. Bordeaux, CNRS, MCC, 33600 Pessac, France
(3) Institut Català de Paleoecologia Humana i Evolució Social (IPHES-CERCA), Zona Educacional 4, Campus Sescelades URV (Edifici W3) 43007 Tarragona, Spain
(4) Departament d’Història i Història de l’Art, Universitat Rovira i Virgili, Av. Catalunya 35, 43002 Tarragona, Spain
(5) Laboratoire de Préhistoire du Lazaret, Départemennt des Alpes-Maritimes, 33 bis blvd Franck Pilatte, 06300 Nice, France
(6) CEPAM – UMR 7264 CNRS – UCA, 24 Avenue des Diables Bleues, 06300, Nice, France

Birds of prey use by paleolithic hunter-gatherers: new insights from Lazaret Cave

Recent studies have shown that the use of birds by Paleolithic hunter-gatherers is an ancient phenomenon, with some archaeological evidence dating back to the Middle Pleistocene in southern Europe (Blasco et al. 2022). The use of raptors during the Middle Palaeolithic has been a subject of considerable discussion, with growing archaeological evidence suggesting that birds of prey held human interest. This evidence extends beyond mere food acquisition and may involve the utilization of secondary products, such as talons, feathers, bones, or tendons. This aspect has also been linked to utilitarian purposes, as well as other cultural, aesthetic, and/or symbolic expressions of Neanderthal behaviour (see Morin and Laroulandie, 2012; Gómez- Olivencia, 2018, and references therein).

The presence of cut marks on raptor bones, particularly on wing and leg bone elements, has been extensively documented (see, for example, Gómez-Olivencia et al. 2018). However, discerning the activities that caused these striae remains challenging, especially in cases where both the removal of feathers and the obtaining of meat could have occurred, as is the case for bones such as the humerus. The humerus, despite having attached packages of meat content, also features the first large wing feathers. The removal of these feathers can leave significant traces on the bones.

In this context, the Lazaret cave has recently provided new data that could contribute to the discussion on this topic. During the first zooarchaeological approach to the avifauna assemblage of the site, numerous bones belonging to birds of prey from different stratigraphic units were identified. These raptor bones were analyzed from a taphonomic perspective to document and describe the observed modifications (Fernández-Jalvo and Andrews, 2016). Notably, in the Archaeological Unit 22 (MIS 6), a humerus bone from a golden eagle (Aquila chrysaetos) exhibited anthropogenic damage in the form of cut marks. This study delves into the activities that could have produced these cut marks and compares them with the existing archaeological record.

Fig. 1 : détail des stries observées sur l’extrémité distale de l’humérus d’aigle royal (Aquila chrysaetos) de l’UA 22 de la grotte du Lazaret

The poster is avalaible there : https://www.researchgate.net/publication/379656212_Birds_of_prey_use_by_paleolithic_hunter-gatherers_new_insights_from_Lazaret_Cave

References:

Blasco, R., Cochard, D., Colonese, A.C., Laroulandie, V., Meier, J., Morin, E., Rufà, A., Tassoni, L.,Thompson, J.C., 2022: “Chapter 8: Small animal use by Neanderthals”, In: S. Benazzi, F. Rivals, F. Romagnoli, Updating Neanderthals, Elsevier Academic Press, pp. 123-143.

Fernandez-Jalvo, Y., & Andrews, P., 2016. Atlas of Taphonomic Identifications. Dordrecht, DE: Springer, doi.org/10.1007/978-94-017-7432-1.

Gómez-Olivencia, A., Sala, N., Núñez-Lahuerta, C., Sanchis, A., Arlegi, M., Rios-Garaizar, J., 2018. First data of Neandertal bird and carnivore exploitation in the Cantabrian Region (Axlor; Barandiaran excavations; Dima, Biscay, Northern Iberian Peninsula). Sci. Rep. 8, 1–14.

Morin, E., Laroulandie, V., 2012. Presumed symbolic use of diurnal raptors by Neanderthals. PLoS ONE, 7(3), 1–5.

Peresani, M., Fiore, I., Gala, M., Romandini, M., Tagliacozzo, A., 2011. Late Neandertals and the intentional removal of feathers as evidenced from bird bone taphonomy at Fumane Cave 44 ky B.P., Italy. P.N.A.S. 108, 3888–3893.

Le bilan de l’année 2023 du projet collectif de recherche (PCR) triennal « Paléoécologie de la grotte du Lazaret : Interactions « Hommes-milieu(x) sur le littoral maralpin au cours du Pléistocène moyen final (MIS 6) »peut être résumé de la façon suivante :

A – Classement des collections

L’année 2023 a été principalement consacrée au classement des collections paléontologiques et préhistoriques de la grotte du Lazaret. Ainsi, l’équipe scientifique du Lazaret a procédé au nettoyage, au classement et au conditionnement de la totalité du mobilier archéologique (600 000 objets pour rappel).

B – Publications 2023

Deux articles ont été publiés :

Barakat S, Le Corre M, Willmes M, Cohen J, Vuillien M, Desclaux E and Britton K (2023). Laser ablation strontium isotopes and spatial assignment show seasonal mobility in red deer (Cervus elaphus) at Lazaret Cave, France (MIS 6). Front. Ecol. Evol. 11:988837. doi: 10.3389/fevo.2023.988837

Rivals, F., Cohen, J. and Desclaux, E. (2023). Dietary traits of the ungulates from the Middle Pleistocene sequence of Lazaret Cave: palaeoecological and archaeological implications. Archaeological and Anthropological Sciences. 15:23. doi : 10.1007/s12520-023-01719-2

En outre, en 2023, les résultats du PCR « paléoécologie du Lazaret » ont fait l’objet de 4 présentations orales, à l’occasion de 3 colloques :

Vuillien, M., Crégut-Bonnoure, E., Brugal, J.P., Mousous, A., Notter, O., Rossoni-Notter, E., Gourichon, L., Desclaux, E. (2023). Les bouquetins maralpins : écomorphologie des bouquetins (Capra ibex) présents dans l’arc liguro-provençal entre la fin du Pléistocène moyen et le début de l’Holocène. XXIVème Colloque du GMPCA, Archéométrie 2023, Campus Saint-Jean d’Angély (avril 2023, Nice), p. 104-105.

Weppe, L., Vigier, N., Thibon, F., Montanes, M., Cohen, J., Theodoropoulou, T., Desclaux, E. (2023). Analyse des isotopes stables du Lithium des invertébrés marins (Bittium sp.) du Pléistocène moyen final (MIS 7 et 6) de la grotte du Lazaret (Alpes-Maritimes, France). XXIVème Colloque du GMPCA, Archéométrie 2023, Campus Saint-Jean d’Angély (avril 2023, Nice), p. 99-100.

Delegue, L., Desclaux, E., Rolando, C., Bray, F. (2023). Sexing of ancient Bovidae teeth by high resolution mass spectrometry. 39^ème édition des Journées Françaises de Spectrométrie de Masse, Palais du Pharo (septembre 2023, Marseille).

Desclaux, E., Cohen, J. (2023).  The prehistoric cave of the Lazaret (Nice, Alpes-Maritimes, France): a place of synergy between the transmission of scientific culture and research. Congrès international « Les abîmes du Temps – La grotte de Malalunga – l’Homme de Néandertal » (octobre 2023, Bari, Italie).

C – Etude préliminaire de l’ichtyofaune de la grotte du Lazaret

L’étude de l’ensemble des 522 restes ichtyofauniques (téléostéens) collectés dans le remplissage de la grotte du Lazaret a permis de confirmer la présence d’un climat froid sur l’ensemble de la séquence connue par les fouilles récentes (ensembles C II inférieur, ensemble C II supérieur et ensemble C III). En outre, il semble que la mort de la majorité des individus se soit déroulée entre la fin de l’automne et le début du printemps. Cela indique que nous avons peut-être à faire à un spectre faunique marin hivernal. Enfin, il n’est pas exclu que des restes de téléostéens (et de mollusques marins) aient été ramenés indirectement par les néandertaliens via l’apport de laisses de mer (herbier de posidonie) dans la grotte.

D – Etude taphonomique et paléoécologique de l’avifaune du Lazaret

L’étude taphonomique de l’ensemble de l’avifaune du Locus VIII qui a montré une accumulation d’origine multiple :

• nidification dans la grotte et/ou la mort d’individus sur place (thanatocoenose),
• prédation par des rapaces et des petits carnivores (coprocoenose),
• part anthropique, avec notamment la mise en exergue de stries sur un nombre non négligeable d’espèces (Columba livia, Aquila Chrysaetos, Bubo bubo, Pyrrhocorax pyrrhocorax, Corvus corone et Pica pica).

L’étude paléoécologique de l’avifaune est en accord avec les résultats obtenus dans l’étude des petits vertébrés et décrivent un caractère homogène, avec d’importantes zones boisées et une humidité fortement marquée sans variation de grande amplitude tout au long de la séquence. Les oiseaux semblent toutefois indiquer une pluviométrie encore plus marquée à la fin de la séquence. Ce caractère homogène est probablement lié au fait qu’au Pléistocène moyen final, les oscillations du MIS 6 ont été de moindre amplitude, comparativement aux oscillations climatiques du Pléistocène supérieur (MIS 5 à MIS 2).

Strie de découpe observée sur un coracoïde gauche de corneille (Corvus corone) provenant de la grotte du lazaret

E – Taphonomie des lagomorphes de la grotte du Lazaret

La chasse aux petits gibiers est un sujet très discuté dans le comportement des néandertaliens et tente souvent de le réduire à une stricte nécessité de survie alimentaire. Cependant, comme nous avons pu le constater, à la grotte du Lazaret l’apport de la viande de lapin dans l’alimentation des hommes reste minime et ne représente pas une source particulièrement nécessaire à leur survie. Le lapin reste toutefois une bonne ressource en sels minéraux dont on voit que le choix de la cuisson, par braisage, optimise le rendement nutritif de cette viande. En effet, l’étude de certaines altérations colorées se présentant sous la forme de points et localisés préférentiellement sur les diaphyses des os longs de lagomorphes et de certains grands mammifères permet de suggérer que la cuisson par braisage a été opérée par les néandertaliens de la grotte du Lazaret. Cette hypothèse doit être prochainement vérifiée grâce à de l’expérimentation, couplée avec des observations au MEB, qui sera menée non seulement sur des lapins (Oryctolagus cuniculus) mais également et plus ponctuellement sur des herbivores (Bos domesticus) et de l’avifaune (Gallus domesticus) actuels. Il est envisagé d’étendre cette étude à d’autres accumulations de lagomorphes provenant de divers sites du Paléolithique moyen du pourtour méditerranéen (MIS 6, 5 et 4 d’Italie du nord, du sud de la France et de la péninsule ibérique).

F – Sexage des bovinés de la grotte du Lazaret par protéomique

L’analyse LC-MS/MS de 20 dents de Bos primigenius et de Bison priscus provenant de la grotte du lazaret a permis d’identifier 4 individus mâles et 16 individus femelles parmi les spécimens se rapportant au genre Bos. Ces résultats et cette méthode pourraient permettre de mieux comprendre l’alimentation de l’homme dans le passé.

Il s’agit de la 1^ère méthode de sexage en paléoprotéomique sur une espèce autre qu’Homo sapiens.

Ces résultats ont été présentés lors du congrès SFSM 2023 du 5 au 8 septembre 2023 à Marseille, au Palais du Pharo.

Maxillaire droit d’aurochs (Bos primigenius) provenant de l’UA 25 de la grotte du Lazaret

G – Etude des matières premières des outillages lithiques de l’unité archéostratigraphique (UA)25

Une étude de la composante silicite de la grotte du Lazaret a été initiée, dans le cadre d’une démarche à trois niveaux :

• caractériser les silex retrouvés à la grotte du Lazaret de façon à déterminer les aires de provenance et la nature des territoires fréquenté,
• aborder le sujet de l’économie des roches à la grotte du Lazaret, en abordant la question du traitement différentiel du corpus « calcaire » et du corpus « silicite »,
• intégrer la collection en silicite de la grotte du Lazaret dans l’étude sur l’histoire des techniques de la fin du Pléistocène moyen et du début du Pléistocène supérieur.

Les premiers résultats appliqués à l’UA 25 de la grotte du Lazaret devront faire l’objet d’un diagnostic technologique plus précis, à la fois pétroarchéologique et techno-fonctionnel.

Les premières observations témoignent du large spectre des roches exploitées et du large territoire parcouru directement ou indirectement par les populations de l’UA 25 de la grotte du Lazaret. La suite de l’étude qui se déroulera en 2024 devra notamment intégrer les refus de tamis, de façon à mieux aborder les dynamiques techno-économiques de formation de l’assemblage. Les faciès devront faire l’objet d’une détermination plus précise et d’une documentation photographique adéquate. La confrontation entre pratiques techniques, structures fonctionnelles et faciès pétrographique devrait autoriser une nouvelle lecture des comportements techno-économiques et des pratiques techniques exprimés à la grotte du Lazaret.

Le projet collectif de recherche (2020-2022) « PCR paléoécologie de la grotte du Lazaret : Interactions hommes-milieu(x) sur le littoral maralpin au cours du Pléistocène moyen final (MIS 6) » a été initié dans le but d’appliquer différentes techniques novatrices transdisciplinaires aux abondantes et diversifiées faunes de vertébrés et d’invertébrés mises au jour dans la grotte préhistorique du Lazaret. Ce PCR a pour objectif d’initier une nouvelle dynamique d’étude du matériel archéologique mis au jour dans la cavité au cours des dernières décennies et d’élaborer un nouveau cadre méthodologique. Cela permettra d’intégrer l’ensemble des aspects éco-éthologiques des faunes fossiles afin de mieux appréhender leurs relations avec les groupes humains ayant occupé la grotte du Lazaret, ainsi qu’avec leur environnement. Ce programme de recherche rassemble une équipe pluridisciplinaire composée de plus de 38 spécialistes.

Si certaines analyses sont encore en cours (paléogénétique et protéomique par exemple), d’autres ont fait l’objet de publications, de mémoires universitaires et de présentations lors de colloques ou de séminaires.

Géochimie isotopique (strontium, oxygène et lithium)

L’analyse séquentielle par ablation laser des isotopes stables du strontium (87Sr/86Sr) et de l’oxygène (18O/16O). Une étude exploratoire des concentrations et des compositions isotopiques en lithium (δ7Li) contenues dans les coquilles de Bittium sp. (gastéropode marin) provenant du remplissage continental (ensembles CIII et CII, MIS 6) et marin (plage marine B, MIS 7) de la grotte a été initiée afin de voir dans quelle mesure elles permettent d’appréhender les paléotempératures de la Méditerranée et les liens entre le climat, la végétation et l’usage des sols au cours des alternances glaciaire/inter-glaciaire. Les mesures isotopiques effectuées mettent en avant des différences notables entre les sédiments continentaux (MIS 6) et marins (MIS 7), ces derniers étant caractérisés par un δ7Li et nettement supérieur aux valeurs obtenues pour les Bittium sp. issus des niveaux datant du MIS 6. En outre, les compositions isotopiques et les concentrations en lithium des gastéropodes marins provenant des niveaux continentaux sont plus faibles au niveau de l’ensemble CIII alors qu’elles sont plus fortes au niveau de l’ensemble CII qui correspond à un interstade. Les données obtenues montrent que cette méthode permet de déterminer les liens entre les variations climatiques, l’extension de la végétation, le développement des sols et la chimie des eaux du littoral maralpin au cours du MIS 6.

Analyse de l’usure dentaire des grands mammifères

Les caractéristiques alimentaires des ongulés de la grotte du Lazaret ont été analysées pour rechercher d’éventuels changements dans les niches écologiques tout au long de la séquence du MIS 6 et pour étudier la durée des occupations correspondant à l’accumulation de restes d’ongulés par des groupes humains. L’analyse a révélé des changements de diversité alimentaire tout au long de la séquence, liés aux changements climatiques et environnementaux du MIS 6. Ces changements ont affecté la disponibilité des ressources végétales, la compétition entre les espèces, la répartition et les déplacements des ongulés sur le territoire. Les groupes humains ont également été touchés par ces changements, comme le montre le registre archéologique de la grotte du Lazaret dans la durée des occupations. La réponse des communautés de grands mammifères à une instabilité climatique persistante se traduit par des différences entre les sites du sud de la France du MIS 6, où les espèces présentent des caractéristiques alimentaires différentes. Ce travail a fait l’objet d’une publication dans la revue Archaeological and Anthropological Sciences (Rivals et al. 2023).

Taphonomie et archéozoologie des petits vertébrés

Un effort considérable a été fourni pour mener des études relevant de la taphonomie et de l’archéozoologie sur les abondantes et diversifiées faunes de petits vertébrés – qui se prêtent tout particulièrement aux analyses paléoécologiques – afin de vérifier que les mécanismes d’accumulation des éléments anatomiques de ces espèces n’ont pas induit de biais de représentation susceptible de fausser les reconstitutions des paléoclimats et des paléoenvironnements. Une étude taphonomique globale des faunes de petits vertébrés (poissons, amphibiens, reptiles, chiroptères, soricomorphes, rongeurs, lagomorphes et oiseaux) menée par divers spécialistes et des étudiants a permis de mettre en évidence une accumulation majoritairement liée à des prédateurs (coprocoenose de rapaces et de carnivores). En outre, l’étude archéozoologique des oiseaux et des lagomorphes a mis en évidence à une accumulation complexe et multiple, incorporant une part anthropique non négligeable qui est liée à une pratique cynégétique occasionnelle.

Emmanuel Desclaux et Jessica Cohen

Bibliographie :

BARAKAT (S), WILLMES (M.), LE CORRE (M.), COHEN (J.), VUILLIEN (V.), DESCLAUX (E.), BRITTON (K.) – Laser ablation strontium isotopes and spatial assignment show seasonal mobility in red deer (Cervus elaphus) at Lazaret Cave, France (MIS 6). Frontiers in Ecology and Evolution, 11, 2023. https:// 10.3389/fevo.2023.988837.

RIVALS (F.), COHEN (J.), DESCLAUX (E.) – Dietary traits of the ungulates from the Middle Pleistocene sequence of Lazaret Cave: palaeoecological and archaeological implications. Archaeological and Anthropological Sciences, 15, 23, 2023. https:// doi.org/10.1007/s12520-023-01719-2.

Par Louis Delegue(1), Emmanuel Desclaux (2), Christian Ronaldo(1) et Frabrice Bray(1)

(1) : CNRS – UAR 3290 – MSAP

(2) : Laboratoire du Lazaret / CNRS -UMR 7264 – CEPAM

Les archéologues et les anthropologues biologiques utilisent de plus en plus la paléoprotéomique pour répondre à des questions sur le passé. Les protéines sont une source indispensable d’informations bioarchéologiques. Les approches paléoprotéomiques de la préparation des échantillons, de l’acquisition et de l’analyse des données en sont encore à leurs balbutiements et sont en retard par rapport à celles employées dans les installations protéomiques conventionnelles. L’émail dentaire humain, qui forme la couronne de la dent, se développe grâce à l’action des cellules améloblastes qui forment le minéral apatite. La matrice de bioapatite de l’émail offre un environnement très résistant pour la préservation des protéines. Certaines proteines, comme l’amélogénine-Y (AMELY) et X, ne sont transcrites qu’à partir du chromosome Y mâle et X femelle et mâle. C’est pourquoi ces protéines ont été utilisées pour le sexage d’individus. En archéologie, l’analyse protéomique de l’amélogénine a permis de sexer des restes d’enfants qui ne pouvaient pas être sexés macroscopiquement. Le sexage basé sur l’amélogénine est également utile pour confirmer l’estimation du sexe des squelettes adultes dont le sexe du squelette est indéterminé, par exemple lorsque le bassin et/ou le crâne sont incomplets.

Actuellement, le sexage par protéomique a été utilisé uniquement sur des restes dentaires d’Homo sapiens. Pour les autres espèces comme les chevaux, cochons, bovins … seules les analyses par PCR sont utilisées mais celles-ci ne fonctionnent pas sur des restes osseux âgés car l’ADN est malheureusement trop souvent dégradé.

L’objectif de cette étude était de mettre en place une méthode de sexage en utilisant la paléoproteomique pour analyser des restes dentaires de bovinés attribués par les paléontologues à Bos primigenius (aurochs) et à Bison priscus (bison) découverts dans les niveaux continentaux du Pléistocène moyen final (MIS 6) de la grotte préhistorique du Lazaret (Alpes-Maritimes, France), sur la base d’un référentiel moderne de ces taxons (mâles et femelles).

L’extraction des protéines contenue dans les dents a été réalisée avec une solution à 5% HCl (v : v) pendant 30 min. Le pH de la solution a été ajusté à 8,8 puis une digestion avec la trypsine ou chymotrypine a été réalisées. Les peptides ont été purifiés sur SPE C18 puis analysés par LC-MS/MS.

L’alignement des séquences des protéines AMEL X et AMELY de Bos montre une différence entre les deux séquences. Il est donc possible d’identifier le sexe avec l’amelogènine pour le genre Bos. L’alignement des séquences des protéines AMEL X du genre Bos et AMELX du genre Bison montre une différence entre les deux séquences. Il est donc possible de différencier le genre Bos et Bison à partir de la protéine amélogénine contenue dans l’émail des dents.

Les analyses LC-MS/MS des dents du genre Bos et Bison, mâles et femelles modernes, ont permis d’identifier la protéine AMELX dans les dents de mâles et de femelles. Par contre, l’AMELY a pu être identifiée uniquement dans les dents de mâles. La digestion avec la chymotrypsine permet une meilleure identification de la protéine avec la présence d’un plus grand nombre de peptide. Un peptide de séquence WYQNMLRYPY provenant de l’AMELX et de WYQSMIRHPY pour l’AMELY ont été sélectionnés pour réaliser le sexage sur les dents des bovins de la grotte du Lazaret.

L’analyse LC-MS/MS des dents de la grotte du lazaret a permis d’identifier 4 individus mâles et 16 individus femelles du genre Bos. Ces résultats et cette méthode pourrait permettre de mieux comprendre le comportement et le stratégies de subsistance des hominines au cours du Pléistocène. Il s’agit de la 1^ère méthode de sexage en paléoprotéomique menée sur une autre espèce qu’Homo sapiens.

Ces résultats ont été présentés sous forme de poster lors du congrès SFSM 2023 qui s’est tenu du 5 au 8 septembre 2023 à Marseille :

https://www.researchgate.net/publication/373829758_Sexing_of_ancient_Bovidae_teeth_by_high_resolution_mass_spectrometry

Mémoire de Master 2 Master Préhistoire, Paléoenvironnement, Archéosciences. Mention « Science de la Terre et des Planètes, Environnement » de l’université Côte d’Azur (Nice) :

Taphonomie et paléoécologie de l’avifaune du Locus VIII de la grotte du Lazaret (Alpes-Maritimes, France) par Anaïs Maurel.

https://www.researchgate.net/profile/Anais-Maurel-3

Résumé :

La grotte du Lazaret (Alpes-Maritimes, France) est un gisement préhistorique du Pléistocène moyen final (MIS 6) d’intérêt paléontologique. Des occupations humaines saisonnières ont été observées dans le remplissage sédimentaire sur une période de -190 000 ans à -120 000 ans. La grotte a livré un riche ensemble de vestiges fauniques parmi lequel les oiseaux occupent une place importante. L’étude de l’avifaune peut permettre d’approcher la paléoécologie d’un site. En effet, étant donné leur sensibilité aux fluctuations climato-environnementales et la stabilité de leurs populations, ils fournissent des indications utiles pour reconstituer le paléoenvironnement et le paléoclimat. Cette étude a pour objectifs : de mener une étude taphonomique sur l’ensemble de l’avifaune du Locus VIII de la grotte du Lazaret, dans le but de tenter de mieux cerner les processus d’accumulation des oiseaux dans cette zone située à l’entrée de la cavité et d’appréhender, sur la base de cette avifaune abondante et diversifiée, l’évolution des paléoclimats et des paléoenvironnements lors des dépôts CI (-190 000 ans à -175 000 ans) et CII (-175 000 ans à -145 000 ans). Afin de mener à bien ce projet, un ensemble de méthodes ont été appliquées. Pour l’approche taphonomique nous avons utilisé des méthodes de quantification ainsi qu’une analyse taphonomique sur un échantillon d’ossements. Par ailleurs, nous avons réalisé des observations au Microscope électronique à balayage (MEB) qui ont permis de mettre en avant de nouvelles traces anthropiques. Pour l’approche paléoécologique diverses méthodes appliquées à l’avifaune ont permis de mettre en avant le caractère spécifique d’une « zone refuge classique » sur le littoral maralpin au cours du MIS 6.

Mots-clefs : grotte du Lazaret, Pléistocène moyen final, Stade isotopique marin 6, taphonomie, avifaune, paléoécologie, Paléolithique moyen, néandertaliens

Abstract :

The Lazaret cave (Alpes-Maritimes, France) is a middle Pleistocene site (MIS 6) of prehistoric and paleontological interest. Seasonal human occupations have been observed in the sedimentary layers from 190 000 years to 120 000 years. The cave has yielded a rich assemblage of faunal remains, among which birds occupy an important place. The study of the avifauna may be useful to reconstruct the environment of the hominins who lived in the past, indeed the avifauna gives elements to better understand the diversity of the environment. The objectives of our study are : to conduct a taphonomic approach on the entire avifauna of Locus VIII of the Lazaret cave, with the aim of trying to better identify the processes of bird’s accumulation in the area located at the entrance of the cave and to apprehend on the basis of the abundant and diversified avifauna, the evolution of paleoclimates and paleoenvironments during the CI (-190 000 years to -175 000 years) and CII (-175 000 years to -145 000 years) deposits. To carry out our intention, a set of methods was applied. First for the taphonomic approach we used quantification methods as well as an analysis of taphonomic alterations on a sample of bones. In addition, we made observation with the Scanning Electron Microscop (SEM) which allowed to put forward new anthropic traces. Concerning the palaeoecological approach, we applied a selection of methods to the avifauna that allowed us to highlight the peculiarity of a “classical refugia area” on the Mediterranean shore during the MIS 6.

Key-words : Lazaret cave, Middle Pleistocene, Marine isotopic stage 6, taphonomy, avifauna, paleoecology, Middle Paleolithic, Neanderthals.

ANALYSE DES ISOTOPES STABLES DU LITHIUM DES INVERTEBRES MARINS (BITTIUM sp.) DU PLEISTOCENE MOYEN FINAL (MIS 7 ET 6) DE LA GROTTE DU LAZARET A NICE (ALPES-MARITIMES, FRANCE)

Présentation d’une communication dans le cadre du XIVe Colloque Archéometrie-GMPCA à Nice (France) du 17 au 21 avril 2023

Analyse des isotopes stables du Lithium des invertébrés marins (Bittium sp.) du Pléistocène moyen final (MIS 7 et 6) de la grotte du Lazaret à Nice (Alpes-Maritimes, France)

par Lucas Weppe’, Nathalie Vigier’, Fanny Thibon’, Maryline Montanes’, Jessica Cohen², Tatiana Theodoropoulou³, Emmanuel Desclaux^2,3

1. LOV – Sorbonne Université, CNRS, UMR7093, Institut de la Mer de Villefranche – France
2. Laboratoire de préhistoire du lazaret – France
3. Université Côte d’Azur, CNRS, CEPAM, UMR7264 – France

Les recherches mises en œuvre au Lazaret se concentrent principalement sur les successions de présence humaine et les mammifères terrestres durant la période d’occupation de la grotte (MIS6). Une étude exploratoire a été initiée sur les concentrations et les compositions isotopiques en lithium contenues dans les coquilles de Bittium sp. (Gastéropode benthique et côtier, espèce subaquatique). Elle a pour but de voir si l’analyse des isotopes du lithium est susceptible de donner des informations sur les paléotempératures de la Méditerranée et sur les liens entre le climat, la végétation et l’usage des sols au cours des alternances glaciaire/interglaciaire, ou si elles peuvent être corrélées à d’autres paramètres comme le métabolisme des Bittium.

Dans le cadre de cette étude, 22 échantillons, provenant des différents ensembles stratigraphiques continentaux (ensembles CIII et CII, MIS 6) et marins (plage marine B, MIS 7) de la grotte du Lazaret, ont été sélectionnés et étudiés. Nous avons ensuite appliqué une méthode récemment développée afin d’extraire la signature isotopique en lithium de la partie carbonatée des coquilles⁽¹⁾.

Après traitement des données et des signes d’altération post-dépôt au sein du sédiment, les mesures isotopiques effectuées mettent en avant des différences notables entre les sédiments continentaux (MIS 6) et marins (MIS 7), ces derniers étant caractérisés par un δ⁷Li important (19.2% et 18,1%), bien supérieur aux valeurs obtenues pour les Bittium sp. provenant des niveaux datant du MIS 6. Concernant les niveaux continentaux, il apparaît que les moyennes des compositions isotopiques et des concentrations en lithium sont plus faibles au niveau de l’ensemble CIII (MIS 6.2 = période glaciaire) alors qu’elles sont plus fortes au niveau de l’ensemble CII (incluant l’ensemble CII supérieur) qui correspond à un interstade (MIS 6.3).

Ces premiers résultats démontrent en premier la possibilité de réaliser des mesures très fines en concentration et en isotopie du lithium dans des coquilles fossiles marines de la grotte du Lazaret. Les données obtenues montrent que cette méthode permet d’examiner les liens entre les variations climatiques, l’extension de la végétation, le développement des sols et la chimie des eaux du littoral.

⁽¹⁾ Bastian L, Vigier N, Reynaud S, Kerros M-E, Revel M, Bayon G (2018) Lithium Isotope Composition of Marine Biogenic Carbonates and Related Reference Materials. Geostand Geoanall Res | doi:10.1111 /ggr. 12218.

Mots-Clés: Lithium, Isotopes, Paléotempératures, Pleistocène moyen final, Méditerranée, Grotte du Lazaret

Publication d’un article dans la revue Frontiers in Ecology and Evolution

Barakat S., Le Corre M., Willmes M., Cohen J., Vuillien M., Desclaux E., Britton K. (2023). Frontiers in Ecology and Evolution, 11 : 988837.

Source : https://doi.org/10.3389/fevo.2023.988837

Résumé :

Le site préhistorique du Pléistocène moyen final de la grotte du Lazaret présente un vaste assemblage de restes fauniques pertinents pour la compréhension des premiers comportements de subsistance des Néandertaliens ainsi que pour la compréhension de l’écologie du cerf (Cervus elaphus) au cours du MIS 6. Cette étude géochimique pilote examine les matériaux du niveau archéologique UA25, qui correspond à une occupation humaine de courte durée datant d’environ 150 000 ans et ayant révélé des milliers d’ossements fauniques, parmi lesquels le cerf rouge et le bouquetin (Capra ibex) sont les plus abondants. Les molaires de trois mandibules de cerf et d’une mandibule de bouquetin ont fait l’objet d’une analyse isotopique du strontium (⁸⁷Sr/⁸⁶Sr) en utilisant la spectrométrie de masse par ablation laser pour déterminer les mouvements des animaux pendant la formation des dents, combinée à une analyse isotopique de l’oxygène intradentaire (δ¹⁸O) pour déterminer la saisonnalité. Les données isotopiques ont été modélisées dans un isoscape local du ration ⁸⁷Sr/⁸⁶Sr et une assignation spatiale par traitement informatique des données a été entreprise pour reconstruire les aires de répartition estivales et hivernales potentielles du cerf. Les résultats de cette étude pilote montrent une mobilité saisonnière dans un rayon de 20 km autour du Lazaret, identifiant deux aires de répartition estivale et hivernale possibles pour le cerf provenant du niveau UA25. Les deux aires d’été possibles sont situées à des altitudes plus élevées et plus éloignées de la grotte du Lazaret, tandis que les aires d’hivernage ont été attribuées à des altitudes plus basses situées à proximité de la côte et plus proches de la grotte du Lazaret. Le bouquetin ne montre aucune variation du ratio ⁸⁷Sr/⁸⁶Sr tout au long de la première, de la deuxième et de la troisième molaire inférieure et l’attribution spatiale indique qu’il a vécu à proximité du site pendant la période de formation des dents. En plus de fournir la première preuve de l’écologie spatiale du cerf dans le sud de la France au cours du MIS 6, les données isotopiques obtenues indiquent que les hominines de la grotte du Lazaret – au moins pour ce niveau – ont probablement occupé la grotte et chassé le cerf en automne et en hiver lorsqu’ils étaient plus proches du site de la grotte, tandis que la chasse ce cet espèce en été aurait nécessité jusqu’à 20 km de déplacement.

Abstract :

Zooarchaeological analysis is a useful means of exploring faunal palaeoecology, paleoclimate and past human behaviours. The Middle Pleistocene archaeological site Lazaret Cave, located in modern-day Nice, France, features a vast assemblage of faunal remains pertinent to the understanding of early Neanderthal subsistence behaviours as well as red deer (Cervus elaphus) ecology during MIS 6. This pilot study examines materials from archaeological layer UA25, a short-term occupation layer at Lazaret dating to ~150,000 years ka, which has revealed 28 early Neanderthal remains as well as thousands of faunal bones, of which red deer and ibex (Capra ibex) are most abundant. Molars from three red deer mandibles and a single ibex were analyzed for strontium (⁸⁷Sr/⁸⁶Sr) isotopic analysis using laser ablation mass spectrometry to determine animal movements during tooth formation, combined with intra-tooth oxygen (δ¹⁸O) isotope analysis to determine seasonality. The isotope data was modelled within a local ⁸⁷Sr/⁸⁶Sr isoscape and computational spatial assignment was undertaken to reconstruct potential summer and winter ranges of red deer. Results from this pilot study show seasonal mobility within 20 km of Lazaret, identifying two possible summer and winter ranges for the red deer excavated from UA25. Both possible summer ranges are located at higher elevations further from Lazaret while winter ranges have been assigned to lower elevations closer to the coastline and closer to Lazaret. The ibex shows no ⁸⁷Sr/⁸⁶Sr variation throughout the first, second and third molar and the spatial assignment indicates it lived proximal to the site during the period of tooth formation. In addition to providing the first evidence of red deer spatial ecology in southern France during MIS 6, we also infer from the faunal isotope data that hominins at Lazaret Cave were likely hunting red deer in autumn and winter when they were closer to the cave site, while hunting in summer would have required up to 20 km of travel.

Dietary traits of the ungulates from the Middle Pleistocene sequence of Lazaret Cave: palaeoecological and archaeological implications

Rivals F., Cohen J., Desclaux E. (2023). Archaeological and Anthropological Sciences, 15, 23

https://doi.org/10.1007/s12520-023-01719-2

Résumé :

Les caractéristiques alimentaires des ongulés de la grotte du Lazaret ont été analysées pour rechercher d’éventuels changements dans les niches écologiques tout au long de la séquence du stade isotopique marin (MIS) 6 du site et pour étudier la durée des occupations correspondant à l’accumulation de restes d’ongulés par des groupes humains. L’analyse a révélé des changements de diversité alimentaire tout au long de la séquence liés aux changements climatiques et environnementaux du MIS 6. Ces changements ont affecté la disponibilité des ressources végétales, la compétition entre les espèces, la répartition et les déplacements des ongulés sur le territoire. Les groupes humains ont également été touchés par ces changements, comme le montre le registre archéologique de la grotte du Lazaret dans la durée des occupations. La réponse des communautés de grands mammifères à une instabilité climatique persistante se traduit par des différences entre les sites du sud de la France du MIS 6, où les espèces présentent des caractéristiques alimentaires différentes.

Abstract :

Dietary traits in ungulates from Lazaret Cave were analyzed for possible changes in ecological niches throughout the marine isotopic stage (MIS) 6 sequence of the site and to investigate the duration of the occupations corresponding to the accumulation of ungulate remains by human groups. The analysis revealed changes in dietary diversity throughout the sequence related to the climatic and environmental changes of the MIS 6. These changes affected the availability of vegetal resources, competition among species, and the distribution and movement of the ungulates in the territory. Human groups were also affected by these changes, as the archaeological record of Lazaret Cave in the duration of occupations at the different levels shows. The response of the large mammal communities to persistent climatic instability is reflected in differences between the sites of southern France of the MIS 6, where species show different dietary traits.

Les principaux résultats obtenus en 2021 dans le cadre du PCR “paléoécologie de la grotte du Lazaret” ont été publiés dans le Bilan Scientifique Régional de la DRAC PACA.

Le fichier PDF peut être téléchargé ici :

Emmanuel Desclaux, Manon Vuillien et Jessica Cohen

Dans le cadre du développement de PCR « Paléoécologie de la grotte du Lazaret – Interactions « Hommes-Milieu (x) sur le littoral maralpin au cours du Pléistocène moyen final (MIS 6) », la reprise des opérations de terrain, qui aura lieu en septembre 2022, constitue un élément essentiel de connaissance de la stratigraphie, de l’archéostratigraphie et, dans un sens plus large, de la recherche paléo-éco-sociale. Prenant en compte le caractère interdisciplinaire du PCR, une approche contextuelle, renforçant des aspects aussi importants que la chronologie, les processus taphosédimentaires et leur relation avec les objets archéologiques, naturelles et/ou culturelles, ouvrent de nouvelles perspectives, inclusives, dans la relation complexe entre l’homme, l’environnement et la survie.

Par rapport au registre culturel, entendu comme tout ce qui est apporté par une communauté lors de son séjour sur le site, générant un espace social d’échange et d’interaction, les aspects de temporalité, diachronique et synchronique, sont essentiels dans l’étude des associations. Les niveaux dits archéologiques, ou sols d’occupation, représentent les structures physiques qui préservent l’ensemble des objets associés. Par conséquent, la compréhension de leur construction nous permettra d’approcher le degré de résolution temporelle qu’ils représentent, définissant clairement le type de relation synchronique et diachronique au sein d’un intervalle sédimentaire. Travailler sur la notion de cycle d’occupation et de ses éléments structurants, est essentiel pour concevoir une séquence archéostratigraphique qui définit (si possible) les notions d’événement, de structure et d’occupation.

Les unités archéostratigraphiques des ensembles stratigraphiques CIII et CII supérieur contiennent un ensemble archéologique qui a fait l’objet d’importantes publications et études en relation avec les communautés humaines du stade isotopique MIS6 (120-190 ky). Les conditions sédimentaires des ensembles CIII et CII supérieur, considérées comme homogènes, c’est-à-dire continues et sans différences lithologiques ou sédimentaires, ont permis d’étudier le remplissage anthropique avec une hypothèse initiale de haute résolution. C’est-à-dire, des surfaces d’occupation plates et d’un espace toujours occupé sur l’ensemble du site.

Les études archéostratigraphiques élaborées suivant ce critère de haute résolution inféré du caractère homogène des sédiments et plat des niveaux, présentent certaines difficultés au moment de garantir l’association correcte des objets et des structures déposées au cours de ce qui pourrait être considéré comme un événement ou épisode d’occupation de la grotte.

La question qui se pose est, en effet, de savoir si les unités archéostratigraphiques telles qu’elles sont actuellement définies correspondent, ou seulement en partie, à des événements réels d’occupation et, si c’est possible, quelle est leur étendue réelle. Autrement, proposer les éléments nécessaires pour définir des cycles d’occupation, définis par des événements récurrents et séparés par des périodes complètes de non-occupation.

Pour la reprise des fouilles archéologiques dans la grotte du Lazaret, l’objectif est de s’intéresser aux aspects archéostratigraphiques du remplissage culturel des complexes sédimentaires CIII et CII supérieur. Dans ce but, un sondage sera effectué car il s’agit d’un mode contrôlé et à faible impact, ce qui permettra d’avoir une séquence verticale fouillée de manière homogène.

La réalisation de l’intervention archéologique comportera deux phases :

Phase 1 : mise en place d’un réseau de bases topographiques, référencées dans le carroyage actuel, qui permet l’utilisation d’une station totale depuis n’importe quel point de la grotte.

Phase 2 : réalisation du sondage archéologique dans la zone délimitée par les carrés X : M11 à N11 ; Y : M11 à M16 (figure 1). Ce sondage ne sera délimité que par 3 parois, étant donné que celle qui suit la ligne N/O, est exposée à l’extérieur et doit être considérée comme une coupe stratigraphique (vouée à disparaître). Le sondage sera toujours effectué de l’extérieur vers la paroi de la grotte (figure 1).

La disponibilité de la coupe stratigraphique facilitera la conduite de la fouille. En ce sens, une tentative sera faite d’évaluer des indicateurs taphosédimentaires pour décider sur l’exécution d’une fouille topographique (plus contextuelle) ou par passés de fouille de 5 cm (plus technique). La décision de cet aspect méthodologique sera prise en tenant compte des difficultés techniques liées à l’homogénéité du sédiment.

Le sondage qui sera réalisé en septembre 2022 devrait permettre d’explorer la partie sommitale de la séquence et notamment les trois premières unités archéostratigraphiques (telles que définies antérieurement par Canals i Salomo en 1993), qui ont été fouillées au tout début des années 1960, qui ont livré des artefacts attribués par certains auteurs à un « Moustérien classique » et dont certains vestiges fauniques suggèrent un éventuel refroidissement des conditions climatiques.